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Construction de l’intelligence

Nous l’avons vu, entre 3 et 5 ans, le jeune être humain traverse une période de développement rapide de ses fonctions exécutives. Il veut alors tout faire par lui-même – mettre ses chaussures, se verser à boire, se laver les dents, s’habiller, boutonner sa chemise, etc. En effet, lorsqu’il fait seul, il exerce et développe ses fonctions exécutives : il garde en mémoire les différentes étapes et les organise pour atteindre un objectif ; il contrôle ses gestes ou les émotions inappropriées, et apprend à rester flexible, c’est à dire, à revoir sa stratégie en cas d’erreur.

Ces trois compétences sont fondamentales et souvent plus prédictives que le QI. Elles permettent à l’être humain de fonctionner, d’atteindre les objectifs qu’il se fixe. Et, bonne nouvelle, pour aider l’enfant à développer ces compétences-socles, il suffit de lui permettre de faire par lui-même, en restant à ses côtés puis en s’effaçant progressivement. Rien de plus. Le fonctionnement d’une classe maternelle doit par conséquent être basé sur l’autonomie des enfants et l’individualisation. Ce fut le cas dans la classe de Gennevilliers, tout l’environnement favorisait un accompagnement individualisé et l’autonomie progressive des enfants, et ce, toute la journée. Dès leur entrée dans la classe le matin, et jusqu’au soir, ils étaient invités à choisir eux-mêmes ce qu’ils voulaient faire et à le faire librement, autant qu’ils le souhaitaient, tout en respectant les règles – clairement explicitées – de vie collective.

Etre autonome au sein de ce cadre structuré et structurant, a permis aux enfants d’épanouir pleinement leurs fonctions exécutives, et notamment, de façon spectaculaire, leur mémoire de travail (voir les résultats). Et, nous l’avons vu, avoir de bonnes fonctions exécutives permet d’entrer plus facilement dans les apprentissages et de développer des relations sociales harmonieuses. C’est ainsi que les enfants de Gennevilliers sont entrés avec facilité dans les apprentissages fondamentaux et ont développé de grandes qualités sociales.

Premiers pas vers l’autonomie.

Pour commencer, montrons aux petits à peine âgés de 2 ans ½, les gestes qui leur permettent d’avancer par eux-mêmes et en confiance dans cet environnement : comment dérouler et rouler un tapis, comment marcher sans déranger les camarades, s’asseoir délicatement, porter et ranger une chaise, mettre seul ses chaussures et les ranger, parler bas, ouvrir et fermer une porte, se moucher, etc. Voici les quatre premières démonstrations évoquées. Vous remarquerez sans doute que nous présentons ces gestes de façon exacte et ordonnée, nous en reparlons après les vidéos. Read More

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Souvenons-nous. Lors des six premières années de sa vie, l’être humain possède un mécanisme cérébral que l’on pourrait dire absorbant, le dotant du pouvoir d’incarner l’environnement sans effort, en réalisant pour chaque expérience vécue, un nombre impressionnant de connexions neuronales. Et, parmi les centaines de connexions qu’il crée par seconde, le cerveau ne conserve que les connexions les plus fréquemment utilisées. C’est ce que l’on appelle l’élagage synaptique, c’est ainsi que l’être humain apprend et se spécialise.

Puisque le cerveau ne conserve que les connexions les plus fréquemment utilisées, par conséquent, ce sont les expériences quotidiennes de l’enfant qui s’encodent et structurent directement l’architecture de son cerveau. Un beau matin, nous rions de le voir faire comme nous, de parler comme nous, de bouger ou de réagir comme nous : c’est souvent un moment particulièrement drôle, surprenant, voire difficile, car l’enfant nous renvoie en miroir les gestes ou les attitudes que nous lui avons transmis inconsciemment, simplement en vivant à ses côtés. Nous pensons qu’il nous imite, mais il serait plus exact de dire qu’il manifeste à l’extérieur ce qui s’est encodé à l’intérieur.

AsmaUne étude saisissante, menée en 1995, illustre la puissance de ce phénomène. Des centaines d’heures d’interactions entre des enfants et des adultes dans 42 familles de tout le spectre socio-économique ont été enregistrées. Les enfants ont été suivis de l’âge de 7 mois jusqu’à l’âge de 3 ans. Les chercheurs ont constaté que 86 à 98 % des mots utilisés par les enfants à 3 ans provenaient directement du vocabulaire de leurs parents. Mais ce n’est pas tout. Non seulement les mots qu’ils utilisaient étaient identiques à ceux de leurs parents, mais le nombre de mots utilisés, la longueur et le style des conversations étaient également les mêmes. Par exemple, les parents de familles les plus pauvres avaient tendance à faire des commentaires courts et superficiels, comme “Arrête,” ou “Descends,” alors que les familles plus favorisées avaient de grandes conversations avec leurs enfants sur une grande variété de sujets.

Il faut donc l’entendre, qu’on le veuille ou non, ce sont ces petites choses auxquelles nous ne faisons pas forcément attention – la façon dont nous parlons, dont nous agissons et réagissons au quotidien – qui structurent, sans aucun filtre, les capacités et les comportements de nos enfants. Autrement dit, nos attitudes préparent les leurs. Cela doit être dit, redit et entendu. Il nous faut maintenant agir en conséquence, aussi bien à la maison qu’à l’école.

#1 Exemplaire tu seras.

Exemplaire tu seras.Quels sont nos comportements, nos mécanismes quotidiens ? Sont-ils en cohérence avec les comportements et les attitudes que nous voulons voir fleurir chez nos enfants ? Commençons donc par là : que l’on soit parent ou enseignant, accompagner un enfant exige une présence à soi, une observation consciente de nos propres gestes et attitudes. Si nous souhaitons voir l’enfant s’exprimer joliment et avec aisance, avoir des gestes délicats et harmonieux, ou faire preuve d’empathie, il n’y a pas 36 solutions : la première des choses à faire est de le faire soi-même. Il s’agit là de la première règle d’or appliquée dans la classe de Gennevilliers, et, je ne vous le cache pas, ce fut la plus difficile à respecter dans l’urgence d’une classe de plus de 25 enfants. Néanmoins, lorsque l’on sait que l’enfant possède un mécanisme cérébral aussi puissamment absorbant, qui se structure à partir de tout ce qu’il perçoit, et que l’on passe en moyenne 6h par jour avec lui dans une classe, cet effort n’est pas une option, c’est une responsabilité.

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L’idée de plasticité cérébrale est centrale dans l’expérimentation que nous avons menée dans la classe maternelle de Gennevilliers. Il était donc important pour nous de l’aborder et de vous la présenter avant de commencer à partager des vidéos pratiques.

En lisant l’article sur la plasticité, vous avez établi de nouvelles connexions neuronales, et il fallait donc trouver un moyen de réutiliser ces connexions pour les renforcer ! Alors voici un petit montage de l’essentiel à retenir pour réactiver vos synapses :) Bon visionnage ! A propos, nous mettrons en ligne la semaine prochaine une première vidéo pratique.

La plasticité cérébrale

C’est un processus continu et dynamique de création, de renforcement et d’élimination de connexions synaptiques. C’est notre processus d’apprentissage. Il commence avant la naissance et se poursuit avec beaucoup de puissance les premières années de la vie pendant lesquelles il pose les fondations de l’architecture cérébrale. La plasticité diminue ensuite progressivement, avec une baisse très nette à la puberté. Mais elle se poursuit tout de même à l’âge adulte. Le cerveau continue constamment de créer de nouveaux circuits, d’en renforcer certains et d’en éliminer d’autres.

Dans l’article All you need is love, nous avons rappelé à quel point notre présence attentive et aimante est primordiale dans les deux premières années de vie pour le développement cérébral. Nous vous avons proposé d’illustrer cet article avec vos moments de pleine présence en famille. Vous avez été nombreux à les partager avec nous et nous en sommes très heureux, car grâce à votre générosité, nous pouvons illustrer ensemble à quel point les manifestations de cette attention sont simples.

Nous avons monté ce petit film avec les images que vous nous avez envoyées et dont la qualité était suffisante. Nous en avons conservé certaines pour un prochain petit film, elles n’apparaissent donc pas ici. Merci donc pour cette belle co-création, nous espérons qu’elle sera la première d’une longue série !

Comment pouvons-nous parler de Démocratie ou de Liberté lorsque, dès le tout début de la vie, nous formatons l’enfant pour subir la tyrannie, pour obéir à un dictateur ? Comment pouvons-nous espérer la démocratie quand nous avons élevé des esclaves ? La vraie liberté commence au début de la vie, pas à l’âge adulte. Ces gens qui ont été diminués dans leurs pouvoirs, fabriqués irréfléchis, dévitalisés par la fatigue mentale ; ceux qui ont été cassés par des ainés qui affirment : « Ta volonté doit disparaître, la mienne prévaut ! » – comment pouvons-nous attendre d’eux, lorsque leur vie d’écoliers se termine, d’accepter et d’utiliser le droit à la liberté ?

Maria Montessori, in Education for a new world.

1949, San Remo (2)Sur cette photo Maria Montessori intervient au 8ème congrès international de San Remo, en 1949. A sa gauche se tient H.E. Gonella, Ministre de l’Education nationale d’Italie.

Pour illustrer le dernier article qui rappelle l’importance des interactions pour le développement cérébral de l’enfant, je souhaiterais faire un montage vidéo qui montre la diversité et la simplicité de ces échanges au quotidien. Et pour cela, j’ai besoin de vous !

Qu’il ait 2 mois, 2 ans ou 6 ans, quels sont les moments où vous êtes pleinement présents à la relation avec votre enfant ? Que diriez-vous de partager un de ces instants avec nous en vidéo ? Je vous propose de le filmer (un bon smartphone fera l’affaire) et de me l’envoyer par wetransfer à classegennevilliers@gmail.com, jusqu’au dimanche 22 février (30 s de vidéo suffisent). Nous nous chargerons ensuite de réaliser un beau montage et de le mettre en ligne pour la fin du mois. Qu’en dites-vous ?

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Savez-vous que les expériences vécues par l’enfant pendant les deux premières années de sa vie influencent son développement cognitif futur ? Cette période post natale est fondamentale. Le bébé absorbe tout de l’environnement auquel il vient de naître. Nous l’avons remarqué, le nouveau-né est un observateur attentif, il étudie et explore le monde avec beaucoup de sérieux. Cette exploration est fondatrice, car ses expériences structurent directement son cerveau. Autrement dit, « grande responsabilité » pour nous, parents et éducateurs : comment être certains d’offrir à l’enfant des expériences adaptées ? De quoi a-t-il besoin pour se construire lors de cette période critique ?

The first year Evidemment, le très jeune enfant explore le monde et se nourrit de ses expériences actives, c’est un besoin fondamental. Mais s’il peut le faire soutenu et étayé par notre attention bienveillante c’est encore mieux. Voilà ce qui semble être l’élément le plus important en cette période de développement intense. Vivre, mais vivre avec nous. Interagir avec lui par le regard, la voix, ou le corps, est véritablement un moteur pour son développement. Ainsi, il nous suffit d’être avec lui, observateur et complice de ses conquêtes. Accepter de marcher, à sa façon, par exemple, en prenant le temps de s’arrêter avec lui à chaque étonnement ; soutenir ses initiatives spontanées comme se nourrir lui même avec sa cuillère alors qu’il ne maîtrise pas encore tout à fait le mouvement de son bras… au final, peu importe ce que nous partageons avec lui – un sourire, des pleurs, un bain, une histoire ou une chanson – il nous suffit de le soutenir dans son exploration du monde en étant présent à la relation.

- En effet, cette présence attentive est fondamentale. L’être humain est un être éminemment social, son cerveau a besoin de l’amour de l’autre pour se développer correctement. Parce qu’il se sent exister dans notre regard, parce qu’il est câliné, parce qu’il est aimé ; le cerveau de cet embryon social mature et développe ses pleins potentiels.

love Que notre présence à l’enfant soit centrale pour son développement, nous le savons déjà plus ou moins intuitivement ; mais ce que nous savons sans doute moins, c’est à quel point cette attention est déterminante pendant la période critique des deux premières années de vie. Pour illustrer cela, voici deux études, évoquées par The National Geographic, qui pointent les conséquences de l’absence dramatique d’attention pendant ces deux premières années. Read More

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